Interview with violinist Laurence Kayaleh – Magazine Accrochages Art et Musique, September 2024.
Par Claire Raffenne
À la recherche du velours
Elle joue un superbe Pietro Guarneri de 1742, illumine les plus prestigieuses salles de sa musicalité profonde, Laurence Kayaleh sera au Montreux Palace le 4 octobre.
Son phrasé musical est passé dans ses mots. Lecture mélodieuse.
Par Claire Raffenne
Quelle a été votre formation ?
Mes parents sont musiciens tous les deux. Ma mère est pianiste, mon père a fondé la prestigieuse Kayaleh Violin Academy à Crans-près-Céligny où j’ai suivi ma formation artistique et reçu un Performer Diploma. Je dois tout à mes parents qui m’ont enseigné, non seulement une technique rigoureuse du violon mais plus encore, d’avoir pris conscience du potentiel qui m’était donné et du sens de ma responsabilité à développer, avec une grande discipline, l’art de servir la noble cause de la musique.
Parlez-nous de votre instrument d’exception.
Je l’ai acquis en 1993 lors d’un essai à la Tonhalle de Zürich. Ce fut un véritable coup-de-coeur! Il est la prolongation de mon âme, de mon cœur. Mon compagnon, sans qui je ne puis vivre et dont je prends un soin immense. Mais je ne suis pas maniaque! (rires) J’ai la chance inouïe de jouer cet instrument d’une extraordinaire musicalité, d’une rare stabilité. Sa puissance et son équilibre me permettent d’interpréter tous les répertoires et d’avoir un contrôle sonore exceptionnel. Il m’apprend chaque jour sur moi-même, me fait gagner en humilité. Ce Guarneri de 1742 m’enseigne les variations de couleurs du vibrato, la projection du son qui font naître l’émotion du public.
Sa beauté est une grâce ! Son vernis d’origine, la tension de son accordage, ses notes soutenues, l’inspiration qu’il provoque dès que je le tiens contre moi.
Nous aurons le bonheur de vous écouter à Montreux le 4 octobre. Dans quel programme?
Comme j’adore explorer la très vaste littérature musicale, j’ai choisi de plonger le public dans le monde du compositeur Fritz Kreisler grand violoniste) avec une sélection de quelques bijoux inédits pour violon et piano accompagnée de Bernadene Blaha. On y découvrira les couleurs infinies d’une ambiance à l’autre, en caressant la virtuosité, le lyrisme, l’intériorité, d’un musicien tellement inspiré, tellement cultivé !
Vous dites que votre mission de musicienne est d’être en communion avec votre public, comment l’atteignez-vous ?
Nous musiciens sur la scène, comme le public, venons avec qui nous sommes, avec nos vécus qui se rencontrent pour partager la même énergie de la musique. C’est un dialogue d’amour unique. La routine n’a pas sa place dans mon métier sinon je n’évolue plus ! Je n’aurai pas assez de toute une vie pour explorer l’infini qui s’offre à moi. Chaque moment m’apprend sur moi-même.
Réussissez-vous à vivre un jour sans votre instrument ?
Le violon c’est ma vie ! Je donne mon sang, je donne tout de moi sur scène ! Mais un jour de temps en temps, je vais puiser une nouvelle fraîcheur dans la nature, dans le temps avec des amis ou seule. La régularité est le secret, et la foi en ce que je réalise, son impulsion. Comme me l’avait enseigné Yehudi Menuhin, cultiver ma personnalité au-delà de la musique, la technique ne fait pas tout!